Par Florence Emilien, Notaire.
Les notaires reçoivent depuis plusieurs années les actes de manière électronique et dans des cas ou circonstances particulières les actes sur papier.
Le notariat est un acteur numérique très dynamique. Il a opéré sa « première révolution numérique » il y a une dizaine d’années, en créant l’acte authentique électronique (AAE) et le minutier central électronique (MICEN).
Notre profession s’essaie d’être à la pointe du numérique pour inventer le notariat de demain et faciliter la vie des clients.
Qu’est-ce que le AAE AD ?
Le notaire qui établit un acte sur support électronique utilise un système de traitement et de transmission de l’information agréé par le Conseil supérieur du notariat en garantissant l’intégrité et la confidentialité du contenu de l’acte. (Art.16 du Décret n° 2005-973 du 10 août 2005 modifiant le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires).
L’acte doit être signé par le notaire au moyen d’un procédé de signature électronique sécurisée conforme aux exigences du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l’application de l’article 1316-4 du code civil et relatif à la signature électronique.
L’article 20 du Décret n° 2005-973 du 10 août 2005 modifiant le décret n° 71-941 du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires dispose « Lorsqu’une partie ou toute autre personne concourant à un acte n’est ni présente ni représentée devant le notaire instrumentaire, son consentement ou sa déclaration est recueilli par un autre notaire devant lequel elle comparaît et qui participe à l’établissement de l’acte. Cet acte porte la mention de ce qu’il a été ainsi établi.
« L’échange des informations nécessaires à l’établissement de l’acte s’effectue au moyen du système de transmission de l’information mentionné à l’article 16. »
L’AAE AD est un procédé qui utilise le circuit sécurisé informatique de la profession notariale ainsi que le système de visio-conférence auquel les offices notariaux de France ont accès.
En se rendant chez leur notaire respectif, des personnes éloignées de centaines de kilomètres peuvent participer à la même séance de signature.
L’AAE AD a été testé en situation réelle une première fois lors du 113ème Congrès des Notaires de France à Lille le 20 septembre 2017.
Il faut toutefois ne pas confondre l’AAE AD avec l’acte authentique signé à distance (dit AAECD ou « acte de comparution à distance») autorisé pour une brève période par le décret n° 2020-395 du 3 avril 2020 qui est venu adapter le régime d’établissement des actes notariés sur support électronique afin de tenir compte des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, et de l’impossibilité pour les parties de se rendre physiquement chez un notaire. Il détermine les conditions et les modalités d’établissement à distance de l’acte notarié sur support électronique.
Comment cela fonctionne ?
L’AAE AD avec notaire participant suppose l’intervention de deux notaires à chaque bout de la chaîne, collaborant ensemble pour le fabriquer : le notaire instrumentaire recevant l’acte et le notaire participant.
Le Notaire instrumentaire crée un espace de partage collaboratif au sein du système MICEN, entre l’office du notaire instrumentaire et l’office du notaire participant.
Le notaire participant à distance recueille l’image de la signature de la ou des parties présentes dans son office et signe lui-même au moyen d’un procédé de signature électronique sécurisé. De son côté, le notaire instrumentaire recueille l’image de la signature de la ou des parties présentes en son office et signe lui-même au moyen du même procédé de signature électronique sécurisé.
Pratiquement, le notaire instrumentaire recevant l’acte authentique électronique lit l’acte en présence de son client et du notaire participant qui est connecté en visio-conférence avec son client. Il dépose dans l’espace de partage l’acte, les annexes et le(s) formulaire(s) de recueil de signature du notaire participant qui récupère dans son logiciel de rédaction d’actes son formulaire de signature. Ce dernier le remet à disposition du Notaire instrumentaire dans l’espace de partage. Le Notaire instrumentaire récupère le formulaire de signature signé, l’intègre à son acte, puis signe et dépose l’acte au MICEN. L’acte est parfait lorsque le notaire instrumentaire y appose sa signature électronique sécurisée. Ainsi, les parties présentes chez leur notaire respectif suivent le déroulement de la séance via un écran partagé.
Combien de temps cela dure ?
Après la lecture de l’acte authentique, le partage de l’acte entre notaires prend de 5 à 15 mn.
Quel intérêt ?
Ce procédé est encadré par des conditions préservant l’authenticité de l’acte et donc la sécurité juridique qui y est attachée. Outre le fait qu’il permette la signature de l’acte à distance entre chaque notaire des parties et leur client, il permet de favoriser la poursuite de l’activité économique, l’acte notarié étant indispensable à de nombreuses opérations juridiques, notamment en matière immobilière.
Prenons par exemple, le cas d’une vente en l’état futur d’achèvement, le notaire en charge du programme va instrumenter l’acte de vente à Paris en présence de son client vendeur, en visio-conférence avec le notaire de l’acquéreur participant à l’acte et son client, se trouvant à Nîmes. L’acquéreur se déplacera uniquement chez son notaire à Nîmes.
Quel avenir ?
Le partage collaboratif de l’acte à distance entre les notaires instrumentaire et participant se poursuit avec succès et est destiné à poursuivre son développement.
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