12.04.2023

La donation transgénérationnelle

Par Agnès BENNI, Gestionnaire de patrimoine

L’espérance de vie augmentant, les enfants héritent de plus en plus tardivement. En 2023, l’âge moyen auquel un enfant hérite de ses parents dépasse 50 ans et il ne cesse d’augmenter. Un âge où le patrimoine est généralement déjà constitué.

Cet écart se creusera au fil du temps, vu l’allongement de l’espérance de vie.

Différentes solutions peuvent répondre à l’anticipation de la transmission de son patrimoine à ses petits-enfants.

Les abattements fiscaux disponibles pour vos petits-enfants tous les 15 ans 

Lorsqu’un parent laisse des biens à ses petits-enfants à son décès, l’abattement applicable est de 1 594 € contre 31 865 € s’il leur avait donné le bien de son vivant.

Ainsi, vous pouvez donner 31 865 € à chaque petit-enfant sans droits, à cela s’ajoute un don manuel de somme d’argent de 31 865 € avant vos 80 ans à vos petits-enfants majeurs.

La donation-partage transgénérationnelle

Elle permet de faire un saut de génération lorsqu’un des enfants souhaite que ses propres enfants recueillent à sa place, tout ou partie de la donation.

Les petits-enfants sont taxés après un abattement de 31 865 € sur la part que chacun reçoit. Cela permet d’éviter les tranches les plus taxées du barème des droits de donation.

Ce saut de génération peut être opéré a posteriori. Des grands-parents, qui ont donné par exemple des titres ou des parts de SCI à un enfant, peuvent procéder, avec son accord, à une donation-partage en réintégrant les biens donnés pour les réattribuer à leurs petits-enfants.

Si la donation originelle date de plus de 15 ans, l’opération est considérée par l’Administration fiscale comme un simple partage, taxé à 2,5 % .

Ce dispositif permettrait de conserver un bien dans la famille quand la valeur de ce dernier a beaucoup augmenté. Ce peut être le cas d’une entreprise familiale qui devrait être vendue à un tiers compte tenu du montant des droits de succession à régler par les héritiers.

Il est possible d’insérer différentes clauses dans l’acte de donation telles que :

    • la donation à terme (pour différer la perception d’un capital à recevoir par le donataire) ;
    • la clause d’exclusion de la communauté (afin que le bien reçu reste un bien propre quelque soit le régime matrimonial du donataire).

Le mécanisme de la représentation

Avant la réforme de 2007 (loi n°2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités), vous ne pouviez pas renoncer à la succession d’un parent pour en faire profiter vos enfants. La renonciation pouvait profiter à vos frères et sœurs. Vous deviez accepter l’héritage puis transmettre ces biens par donation à vos enfants. Les actifs subissaient une double imposition.

Depuis la réforme de 2007, la renonciation de l’héritier permet à ses enfants de recevoir la succession directement du défunt. (art. 754 du code civil).

Contrairement à une donation transgénérationnelle, la renonciation ne peut pas être partielle. Si vous avez 1 enfant unique, c’est lui qui recevra l’intégralité de la succession.

Au plan fiscal, votre enfant bénéficie de l’abattement de 100 000 € qui aurait dû vous être appliqué. Si vous avez plusieurs enfants, l’abattement de 100 000 € se répartit entre les enfants, avant application du barème général des droits de succession entre parents et enfants. (de 5 % à 45 %).

Faire évoluer la clause bénéficiaire de votre contrat d’assurance-vie

L’assurance-vie permet de transmettre des capitaux hors succession dans des conditions fiscales avantageuses (notamment si les versements ont été réalisés avant 70 ans). La clause type proposée par les compagnies désignent généralement « mon conjoint, à défaut, mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés, à défaut mes héritiers ».

Il ne faut pas hésiter à revoir cette clause. Vous disposez d’une grande liberté de rédaction afin de l’adapter à vos souhaits de transmission.

  • Vous pouvez nommer votre conjoint pour une part du capital, et le solde à vos enfants par parts égales entre eux.

Si vous disposez d’un capital suffisant par ailleurs, et dans la mesure où votre conjoint est exonéré de droits, vous pouvez nommer vos enfants et vos petits-enfants bénéficiaires afin qu’ils bénéficient chacun de l’abattement de 152 500 € tous contrats confondus hors droits (art. 990 I du code général des impôts) pour les primes versées avant 70 ans.

Dans une famille où l’assurance-vie est destinée à deux enfants et quatre petits-enfants, par exemple, cela permet de profiter six fois de l’abattement et de transmettre quasiment un million d’euros sans aucun droit de succession.

  • La clause bénéficiaire peut être démembrée en nommant vos enfants usufruitiers, et vos petits-enfants nus-propriétaires. Ce qui permettra à vos enfants de disposer des capitaux et à vos petits-enfants de percevoir la pleine propriété de ce capital au décès de leur parent.

Ce mécanisme permet de transmettre votre capital sur plusieurs générations en limitant les droits.

A noter que le bénéfice de l’abattement fiscal s’appliquera au prorata de la valeur de l’usufruit et de la nue-propriété au jour du dénouement du contrat par décès du souscripteur (le grand-parent).

  • Vous pouvez aussi intégrer des dispositions concernant le renoncement des bénéficiaires, afin que l’un d’eux puisse se désister en faveur de ses propres enfants.

Cette clause peut être modifiée à tout moment pour s’adapter aux évolutions familiales. Elle n’est jamais figée.

Pour éviter tout risque de remise en cause de vos choix, mieux vaut effectuer la rédaction devant un notaire, surtout quand le souscripteur atteint un grand âge.

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