Par Gaëlle THOMAS, Diplômée notaire et Jérôme HOUZAI, Notaire associé
Focus sur le lotissement,
Ainsi que le confirme le Conseil d’Etat aux termes d’un arrêt en date du 29 novembre 2023 n°470788, (assoc. Défense de l’environnement), une opération consistant à détacher un terrain qui supporte déjà un bâtiment dont la démolition n’est pas prévue n’est pas un lotissement, même s’il est envisagé de l’étendre ou de lui adjoindre des annexes, éventuellement après une démolition partielle.
La jurisprudence est sans surprise. La division en deux lots caractérise un lotissement s’il est prévu d’implanter des bâtiments sur au moins l’un des deux lots.
En revanche, si l’opération ne consiste qu’à détacher un terrain où figurent déjà des bâtiments que le propriétaire n’entend pas démolir, et sur lequel il n’entend pas reconstruire, elle ne peut être qualifiée de lotissement.
Nous allons donc étudier la notion de lotissement, et voir ses applications au vu d’exemples concrets.
1- Définition du lotissement
1.1– Opérations constituant un lotissement
Article L.442-1 du code de l’urbanisme
« Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d’une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. »
A – La division d’une unité foncière
L’unité foncière
L’unité foncière se définit comme un « îlot d’un seul tenant composé d’une ou plusieurs parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision » (CE, 27 juin 2005, n° 264667, Cne de Chambéry c/ Balmat).
Il est possible de déposer une demande de lotissement sur des unités foncières appartenant à des propriétaires différents dès lors qu’elles sont contiguës. Un lotissement ne peut donc pas être multi sites.
Par ailleurs, la demande de Permis d’Aménager (art. R.441-1 du code de l’urbanisme) ou la Déclaration Préalable (art. R.441-9 du code de l’urbanisme) « peut ne porter que sur une partie d’une unité foncière ».
La division
La division foncière doit intervenir en propriété (vente, donation, partage, succession…) ou en jouissance (bail en vue de construire).
Si la division en jouissance a lieu sans transfert de droit à construire, elle ne constitue pas un lotissement (CE, 7 mars 2008, n° 296287, « Commune de Mareil le Guyon »).
La réglementation du lotissement ne régit que les divisions du sol, elle exclut par conséquent les divisions en volume (CE, 30 nov. 2007, n° 271897, Cne Strasbourg).
B – L’intention de construire
La procédure de lotissement implique que la division foncière soit réalisée en vue de l’implantation d’un ou plusieurs bâtiments, quelle que soit la destination du ou des bâtiments (habitation, agricole…).
Ainsi pour qu’il y ait lotissement, le ou les terrains issus de la division doivent soit être nus, soit supporter une ou plusieurs constructions destinées à la démolition en vue de sa/leur reconstruction.
1.2– Opérations ne constituant pas un lotissement
Article R.442-1 du code de l’urbanisme
« Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à Déclaration Préalable ni à Permis d’Aménager :
a) Les divisions en propriété ou en jouissance effectuées par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d’aménager portant sur la création d’un groupe de bâtiments ou d’un immeuble autre qu’une maison individuelle au sens de l’article L.231- 1 du code de la construction et de l’habitation. »
Nota Bene : il s’agit des « divisions primaires », c’est-à-dire celles effectuées (par vente, location ou partage) par un propriétaire au profit de personnes ayant obtenu un Permis de Construire ou un Permis d’Aménager. La division doit donc intervenir postérieurement à l’obtention du permis.
Ce permis pourra porter :
-
- sur un groupe de bâtiments quelle qu’en soit la destination ;
- sur un seul bâtiment quelle qu’en soit la destination, à condition qu’en cas d’habitation, il s’agisse d’un immeuble collectif et non d’une maison individuelle au sens de l’article L.231-1 du code de la construction et de l’habitation.
« b) Les divisions effectuées dans le cadre d’une opération de remembrement réalisée par une association foncière urbaine autorisée ou constituée d’office régie par le chapitre II du titre II du livre III ;
Nota Bene : il s’agit des associations foncières urbaines dont le plan de remembrement a été approuvé par le Préfet. Les associations foncières urbaines libres (AFUL – articles L.322-1 et R.322-1 et suivants du code de l’urbanisme) ne sont pas concernées.
« c) Les divisions effectuées par l’aménageur à l’intérieur d’une zone d’aménagement concerté. »
Nota Bene : en revanche, les divisions effectuées par un acquéreur de lot ou d’îlot à l’intérieur de la ZAC constituent un lotissement.
« d) Les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l’article R*431-24.»
Nota Bene : il s’agit du permis valant division
« e) Les détachements de terrains supportant des bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis. »
« f) Les détachements de terrain d’une propriété en vue d’un rattachement à une propriété contiguë ; »
« g) Les détachements de terrain par l’effet d’une expropriation, d’une cession amiable consentie après déclaration d’utilité publique et, lorsqu’il en est donné acte par ordonnance du juge de l’expropriation, d’une cession amiable antérieure à une déclaration d’utilité publique ; »
« h) Les détachements de terrains réservés acquis par les collectivités publiques dans les conditions prévues aux articles L.230-1 à L.230-6 ; »
« i) Les détachements de terrains résultant de l’application de l’article L. 332-10 dans sa rédaction en vigueur avant la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, ou de l’application de l’article L. 332-11-3. »
Nota Bene : il s’agit des détachements de terrains résultant d’un apport de terrain dans le cadre d’un plan d’aménagement d’ensemble (PAE) ou d’un projet urbain partenarial (PUP).
2– Champ d’application
Les lotissements sont soumis soit à :
-
- Permis d’aménager (PA) (art. 421-19 a du code de l’urbanisme) :
- s’ils « prévoient la création ou l’aménagement de voies, d’espaces ou d’équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement. Les équipements pris en compte sont les équipements dont la réalisation est à la charge du lotisseur » ;
- ou s’ils « sont situés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques, dans un site classé ou en instance de classement ; » (…)
- Permis d’aménager (PA) (art. 421-19 a du code de l’urbanisme) :
Les sites patrimoniaux remarquables (SPR) regroupent les anciens secteurs sauvegardés, les zones de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP) et les aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (AVAP).
Déclaration préalable (DP) (art. 421-23 du code de l’urbanisme) :
-
- s’ils n’entrent pas dans le champ d’application du a) de l’article R.421-19 du code de l’urbanisme et ce, dès le premier lot.