Par Hélène GRAS, Notaire
Que faire quand son logement est occupé illégalement ?
On parle ici d’une situation de squat, c’est-à-dire d’une occupation sans droit ni titre. Un squatteur est une personne qui entre dans un logement par effraction ou par tromperie, dans le but de l’occuper sans l’autorisation du propriétaire.
Est ainsi écarté de cette définition le locataire qui se maintient dans le logement après la fin du bail.
Le propriétaire confronté à cette situation a aujourd’hui le choix entre deux procédures : une procédure accélérée permettant l’évacuation forcée du squatteur ou une procédure d’expulsion devant le juge.
Au préalable, il devra :
- porter plainte pour violation de domicile au commissariat de police ou à la gendarmerie
- prouver que le logement lui appartient
- faire constater par un officier de police judiciaire que le logement est squatté
La procédure accélérée
L’article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 prévoit que le propriétaire doit demander au préfet de mettre en demeure le squatteur de quitter le logement, ce dernier ayant 48 heures pour rendre sa décision.
La mise en demeure est ensuite notifiée au squatteur, qui doit quitter le logement dans le délai fixé par le préfet ; affichée en mairie et sur l’immeuble ; notifiée au demandeur.
Si le squatteur n’a pas quitté le logement conformément à la mise en demeure, le préfet devra faire évacuer les lieux sans délai, par le recours à la force publique.
Cette procédure accélérée a été étendue aux résidences secondaires depuis la loi n° 2020-1525 en date du 7 décembre 2020. Cette même loi est venue nuancer le dispositif en octroyant au préfet la faculté de refuser la mise en demeure pour un motif impérieux d’intérêt général.
La procédure d’expulsion
Le Code des procédures civiles d’exécution (articles L.412-1 et suivants) permet au propriétaire de saisir un avocat qui devra présenter en référé au juge une demande d’expulsion du squatteur et de condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation.
Le propriétaire devra s’être ménagé la preuve que son logement est squatté en mandatant un commissaire de justice.
En outre et peu importe la procédure engagée par le propriétaire, des sanctions sont prévues à l’article 226-4 du Code pénal :
- une peine d’un an d’emprisonnement et 15.000,00 euros d’amende pour être entré dans le logement
- une peine d’un an d’emprisonnement et 15.000,00 euros d’amende pour être resté dans le logement
Dans les deux procédures, la trêve hivernale ne s’applique pas.
Certains estimaient que des zones d’ombres existaient, au détriment du propriétaire. Par exemple rien n’est prévu pour le locataire qui occupe le logement en ne payant plus son loyer ou qui reste dans les biens à la fin du bail. Le propriétaire est également confronté au pouvoir quasi discrétionnaire laissé au préfet, qui peut décider d’agir en faveur du squatteur pour éviter des troubles à l’ordre public.
C’est pourquoi un projet de loi « visant à lutter efficacement contre le squat et à protéger la propriété immobilière » a été présenté en octobre dernier afin de clarifier le régime juridique du squat et d’accélérer le contentieux locatif.
Ledit projet a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 2 décembre 2022.
La commission des lois du Sénat a ensuite voté quelques amendements le 25 janvier 2023. L’objectif des sénateurs était « d’assurer un équilibre entre la nécessité de lutter plus fermement contre les squats et l’indispensable sécurisation des rapports locatifs ».
A ce stade voici les propositions qui résultent des échanges entre l’Assemblée nationale et le Sénat.
- Un durcissement de la pénalisation : le squatteur risquerait trois ans d’emprisonnement et 45.000,00 euros d’amende. Le locataire en difficulté s’exposerait lui aussi à des sanctions.
- Un délai raccourci d’un mois entre le commandement de payer infructueux et l’assignation en justice.
- L’insertion obligatoire dans les contrats de bail d’une clause de résiliation de plein droit permettant une procédure d’expulsion accélérée.
Affaire à suivre donc car la proposition de loi est actuellement en deuxième lecture à l’Assemblée nationale.